Conférence de Paix au Proche-Orient : une énergie mal dépensée
15 janvier 2017 – New York – Suite au rassemblement à Paris des représentants de 70 pays pour discuter de la question israélo-palestinienne, David Harris, Directeur exécutif d’AJC a publié la déclaration suivante :
« Comme nous l’avons dit à maintes reprises avant cette conférence, AJC a longtemps soutenu la recherche d’un accord de paix durable entre Israël et les Palestiniens basé sur un accord à deux États.
C’est précisément dans cet esprit que nous avons exprimé nos inquiétudes, estimant que cette conférence serait sans intérêt au mieux, et un obstacle à la perspective d’un accord au pire. Nos préoccupations, à la suite des conclusions de la conférence, peuvent être résumées en cinq points.
Tout d’abord, c’est désormais une évidence, les Palestiniens ont évité le seul lieu où un accord aurait pu être trouvé : la table des négociations avec les Israéliens. Par conséquent, toute tentative diplomatique qui encourage les Palestiniens à croire qu’ils peuvent atteindre leurs objectifs sans négociation ni pourparlers en face à face est une erreur.
Deuxièmement, Israël a estimé, à juste titre, que ses propres préoccupations ont été ignorées lors de la conférence. Le Premier ministre israélien l’a d’ailleurs qualifiée de « futile » et de « biaisée ». Isoler dans tous les sens du terme l’une des deux principales parties au conflit n’est pas une stratégie pour réussir.
Troisièmement, il n’a échappé à personne que cette conférence a eu lieu 5 jours avant la prise de pouvoir de la nouvelle administration américaine. Le président élu Trump et son équipe n’ont jamais caché leurs objections quant à cette conférence. Il est fort possible qu’il y ait un possible « retour d’ascenseur » après le 20 janvier, date à laquelle la communauté internationale n’aura d’autre choix que celui de comprendre que les États-Unis sont l’un des acteurs indispensables pour faire avancer le processus de paix israélo-palestinien et que la nouvelle administration pourrait ne pas oublier ce qu’il s’est passé le 15 janvier.
Quatrièmement, la France a une nouvelle fois perdu des points pour être considérer comme un « honnest broker » dans le conflit, à l’inverse du Royaume-Uni qui l’a encore démontré de manière louable. A son crédit, Londres a adopté une approche non officielle, affirmant dans un communiqué officiel : « Nous avons des réserves particulières à propos d’une conférence internationale destinée à faire avancer la paix qui n’impliquent par les parties concernées et qui a lieu quelques jours avant la transition vers un nouveau président américain alors que les États-Unis seront le garant ultime de tout accord. Il y a donc des risques que cette conférence endurcisse les positions à un moment où nous devons encourager les conditions de la paix. C’est pourquoi nous y avons assisté en tant qu’observateur et n’avons pas signé le communiqué. »
Enfin et surtout, cette conférence a cherché une nouvelle fois à internationaliser le conflit, seulement quelques jours après que le Conseil de sécurité de l’ONU ait fait la même chose.
En attendant, d’autres questions pressantes demandent une attention et des résolutions, mais en vain. La Syrie représente avant tout la plus grande tragédie humaine du XXIe siècle, brisant le pays, tuant des centaines de milliers de personnes et entraînant des millions d’exilés, avec des ramifications profondes aussi bien pour les pays voisins que pour l’ensemble de l’Europe. Pourtant à chaque fois, les efforts et les investissements de la conférence de Paris sont allés à la question israélo-palestinienne, et non à la Syrie (un sujet sur lequel la France revendique pourtant une compréhension historique spéciale et un savoir-faire politique). Parmi les autres défis majeurs : la désintégration des Etats d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, la rude tentative russe de diviser l’Europe contre elle-même en poursuivant son occupation de la Crimée et de l’Ukraine orientale, ou les profondes menaces terroristes en Europe, ainsi que la montée des partis politiques xénophobes et populistes et l’échec de l’intégration.
Cette conférence est maintenant derrière nous et, heureusement, le Secrétaire d’État des États-Unis, John Kerry, a garanti qu’aucune mesure du Conseil de sécurité de l’ONU ne suivraient dans les prochains jours.
En définitive, le siège palestinien reste vide à la table des négociations. Lorsqu’il ne le sera plus, nous pourrons peut-être nous attendre à un cadre approprié pour atteindre l’objectif ultime : deux États pour deux peuples vivant côte à côte en paix. »