Antisémitisme et fondamentalisme islamiste: la responsabilité de nos «responsables» politiques
TRIBUNE DE SIMONE RODAN BENZAQUEN, DIRECTRICE DE AJC PARIS DANS LIBERATION – 15/02/2015
Certains de nos représentants ont fait le lit du terrorisme en abandonnant des quartiers pour acheter la paix sociale.
17 morts, 66 millions de blessés ou plus, plus de 3,7 millions et demi de Français dans la rue, 7 millions d’exemplaires de Charlie Hebdo édités, de nombreuses initiatives prises dont une centaine de procédures pénales ouvertes pour apologie du terrorisme. A l’heure de ce premier bilan, parce que je revois un peuple français endeuillé et solidaire, parce que je revois la réaffirmation des valeurs de la République par des millions de Français de toute origine et religion, parce que le Président François Hollande a fait de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme une «grande cause nationale», parce que je me souviens du grand discours du Premier ministre Manuel Valls déclarant: «Aujourd’hui, nous sommes tous Charlie, tous policiers, tous juifs», donnant une ligne directrice claire au gouvernement de «fermeté, sérénité et unité», je me dis que cet «esprit du 11 janvier» pourra peut-être perdurer.
Pourtant, je ne cesse de penser que nous avons perdu beaucoup de temps et gâché trop de vies. Ces 17 morts mais aussi Ilan Halimi, les victimes de Mohamed Merah et celles de Mehdi Nemmouche. C’est alors que je pense au Général de Gaulle et à sa définition de la France. «J’ai d’instinct l’impression que la Providence l’a créée pour des succès achevés ou des malheurs exemplaires. S’il advient que la médiocrité marque, pourtant, ses faits et gestes, j’en éprouve la sensation d’une absurde anomalie, imputable aux fautes des Français, non au génie de la patrie.» Car c’est bien cela que sont ces victimes: une absurde anomalie imputable aux fautes de certains de nos compatriotes.
L’histoire de France a toujours dénoncé les responsables voire les coupables au sein de ses représentants. Parmi eux il y a les acolytes passifs, ceux qui n’ont pas vu la réalité du fondamentalisme islamiste, de l’antisémitisme et de la haine dans certains de nos quartiers, ceux qui ont préféré ne pas la voir, ceux qui l’ont vue mais se sont tus et ceux qui ont laissé faire en laissant ce monstre à plusieurs têtes se mettre à dévorer notre République. Parmi eux, il y a des Français ordinaires, des journalistes, des responsables politiques, des commentateurs politiques, des intellectuels de tout bord, absents, lâches, médiocres.
Mais sur le banc des accusés, il y a pire; il y a les complices actifs, comme certains de nos «responsables» politiques locaux ou nationaux qui, depuis des années, font le lit du terrorisme, du populisme, du salafisme et de l’antisémitisme. Pendant plus de vingt ans, ces derniers ont préféré acheter la paix sociale, comme l’a récemment rappelé le député de l’Essonne Malek Boutih, par l’abandon pur et simple de certains quartiers aux mains d’associations douteuses et d’autres apôtres de la haine. «Les élus locaux corrompus ont pactisé avec les voyous, les salafistes et les communautés pour avoir la paix. Nous ne pouvons plus laisser prospérer les supermarchés de la drogue dans nos cités dont on voit qu’ils [les élus] entretiennent des filières où gangsters et islamo-nazis se donnent la main», a courageusement déclaré Malek Boutih.
Il faut vigoureusement dénoncer ces symboles visibles de ce genre de comportement délibérément voulus par de nombreux maires de France. Ils ont caressé dans le sens du dévoiement certaines associations et une frange particulière d’électeurs. Ils ont érigé des terroristes, notamment palestiniens, au rang de symbole de leur ville. C’est le cas de treize maires qui ont fait de Marwan Bargouthi le citoyen d’honneur de leur ville. Or faut-il le rappeler, Marwan Barghouti a été condamné par la justice israélienne à cinq peines de prison à perpétuité pour le meurtre de cinq civils israéliens et pour son implication dans quatre attaques terroristes.
Par ailleurs, le maire de la ville de Bezons (Val-d’Oise) a fait citoyen d’honneur de sa ville Majdi Ihrima Al-Rimawi, condamné à quatre-vingts ans de prison pour sa participation à l’assassinat du ministre du Tourisme, Rechavam Zeevi. Or, suite à l’annulation de cette distinction par le tribunal administratif de Pontoise, en février 2013, le Maire a fait des 4500 Palestiniens reconnus coupables et incarcérés par la justice israélienne, des citoyens d’honneur symboliques.
HUILE SUR LE FEU
En glorifiant de telle manière des terroristes, en les appelant «résistants» et en remettant en cause la réalité, l’ampleur et la gravité des crimes commis par ces terroristes jugés et condamnés, ces représentants de la République ne se sont pas seulement limités à une critique politique ou idéologique de la politique de l’Etat d’Israël, ils ont dramatiquement outrepassé leur fonction. L’attachement à la cause palestinienne ou israélienne, le débat sur le conflit au Proche-Orient sont des comportements sains lorsqu’ils se cantonnent au seul débat démocratique. La justification, l’apologie du terrorisme et de l’antisémitisme, l’instrumentalisation de la cause palestinienne et la transformation de cette dernière en un soutien pour le terrorisme, ou encore la fraternisation avec des ennemis de la République sont des comportements indignes pour des élus de la République. Il faut dénoncer de telles initiatives qui ne font que mettre de l’huile sur le feu, car l’objectif et l’aboutissement de telles démarches ne peuvent aboutir qu’à la réhabilitation des meurtriers et à la justification de meurtres aveugles de civils innocents, de civils israéliens, de civils juifs.
Or, les actes, fussent-ils commis hors de France, de ces terroristes ne sont pas moins horribles, ni plus acceptables que ceux commis par Amedi Coulibali, les frères Kouachi, Mohammed Merah ou Mehdi Nemmouche. Dès lors, comment veut-on que nos enfants discernent ce qui est acceptable et ce qu’il ne l’est pas ou comprennent ce qu’est l’idéologie terroriste, si nos responsables politiques sont dans la perversion intellectuelle et morale absolue? Comment veut-on empêcher nos jeunes «d’importer le conflit» sur notre territoire, si nos maires excusent, non, glorifient la haine d’Israël? La confusion morale, la révision de faits de ce type de comportement remettent en cause les valeurs qui fondent la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et même le terrorisme. Ainsi, la justice française devrait-elle se saisir de ces cas, pour apologie de terrorisme.
Par ailleurs, quid de certains élus, notamment les représentants du Nouveau parti anticapitaliste, certains responsables d’Europe Ecologie-Les Verts ou du Parti communiste, qui ont participé, et même appelé à défiler aux manifestations pro-palestiniennes l’été dernier, pourtant interdites par les autorités? Ils ont marché aux côtés de drapeaux de Daech, du Hezbollah et du Hamas place de la République, à proximité de pancartes ouvertement antisémites, tandis que des «morts aux juifs » résonnaient dans les rues. N’ont-ils pas également une responsabilité morale dans la justification du terrorisme et de cette perpétuelle violence antisémite?
Si nous voulons vraiment que l’esprit du 11 janvier puisse avoir quelque chance de perdurer; si nous souhaitons arriver à lutter efficacement contre le terrorisme, l’antisémitisme et le racisme; si nous avons pour ambition de faire comprendre à nos enfants les valeurs de la République afin qu’ils les intègrent, nous devons être intraitables face à ce genre de comportement, particulièrement quand il est le fait de nos élus français. Ne soyons plus lâches, ne regardons pas ailleurs, ne fermons pas les yeux, ne perdons plus de temps et ne laissons pas la place aux pyromanes, car le prix à payer serait bien trop élevé. Retrouvons l’esprit français qui a fait la grandeur de notre pays.