Perceptions de l’antisémitisme : que nous disent les résultats du sondage réalisé pour la Commission Européenne ?

Selon les résultats de  l’Eurobaromètre de la Commission européenne, réalisé du 4 au 20 décembre 2018 dans tous les pays de l’Union Européenne (avec la méthodologie du « face-à-face », au total 27.643 interviews ) :

  •  72% des Français considèrent que l’antisémitisme est un problème dans le pays ; c’est bien plus que la moyenne des Européens (50%). La prise de conscience du phénomène de l’antisémitisme est globalement plus importante en France que dans la plupart des autres pays européens ; à l’exception des pays où, comme en France, la communauté juive est importante et les attaques physiques contre les citoyens juifs nombreuses (Suède, Allemagne, Pays-Bas, Italie, Royaume-Uni et Belgique) ;
  •  Il est intéressant de noter néanmoins la forte différence de perception entre l’ensemble des Français et les Français juifs quant à l’augmentation de l’antisémitisme dans le pays au cours des cinq dernières années : 77% des Français juifs pensent que l’antisémitisme a fortement augmenté ces dernières années – c’est le constat de la récente étude publiée par l’Agence de l’Union européenne pour les droits fondamentaux (FRA) ; or c’est seulement 51% pour l’ensemble des Français d’après l’Eurobaromètre – preuve de l’enjeu que constitue le fait de porter la lutte contre l’antisémitisme au rang de cause nationale, considérée comme telle non seulement par la communauté juive mais par l’ensemble des citoyens français ;
  •  Si seulement 51% des Français pensent que l’antisémitisme a augmenté en France ces cinq dernières années, c’est là encore bien plus que la moyenne européenne (36% ; tandis que 39% des Européens pensent qu’il est resté stable). La différence en matière d’âge est là encore flagrante : seulement 29% des 15-24 ans pensent qu’il a augmenté contre 47 à 59% pour les catégories d’âge supérieur ;
  •  La tranche d’âge 15-24 ans est nettement moins inquiète de l’antisémitisme en France que le reste de la population (58% considèrent que c’est un problème contre 74% pour les autres catégories d’âge). Cela rejoint les résultats de notre récent sondage IPSOS, en partenariat avec la Fondation Jean Jaurès, la FEPS et la DILCRAH, venu en complément de la grande étude CNN et qui montrait que les jeunes ont une moins bonne connaissance de la Shoah que leurs aînés et que cela se traduit aussi par une moindre importance donnée à la lutte contre l’antisémitisme ;
  •  75% des Français considèrent que les gens sont mal informés sur l’histoire, les coutumes et les pratiques des Juifs. C’est une immense majorité. Ceci nous invite à nous interroger sur l’action essentielle à mener en matière d’éducation (l’enseignement de la Shoah est crucial mais sans doute n’est-il pas suffisant). Aussi, une majorité de Français (44%) pensent que la Shoah n’est pas suffisamment enseignée dans les écoles, ce qui rejoint à nouveau les conclusions de notre récente étude sur la connaissance de la Shoah par les plus jeunes ;
  •  63% des Français considèrent que les conflits au Proche-Orient ont une influence sur la manière dont les Juifs sont perçus par la population en France. Cela confirme la nécessité d’aborder de front et par des actions concrètes la question de l’antisionisme comme un vecteur majeur de préjugés antisémites aujourd’hui en France.