Naama: Nous sommes tous avec toi !

Honte !

Celui qui ose tourmenter une petite fille sur sa prétendue «impudeur» devrait être arrêté et poursuivi par la justice.

Celui qui crache sur un jeune enfant au nom de la religion commet un blasphème

Celui qui ose appeler un tel enfant une «prostituée» doit être, avouons-le, un malade mental.

Naama a huit ans. Elle est la fille de juifs pratiquants qui ont émigré en Israël des États-Unis. Elle fréquente une école religieuse à Beit Shemesh, dans le coeur d’Israël.

Pourtant, pour les fanatiques, elle n’est ‘’pas assez pieuse », donc coupable et donc sujette à tous les anathèmes.

« Quand je vais à l’école le matin, j’ai mal au ventre parce que j’ai si peur quand ils commencent à crier et à me cracher dessus», a-t-elle dit dans une interview avec l’AP. Et à la télévision israélienne elle a exprimé sa crainte d’être plus violemment agressée et blessée.

Est-ce cela, la religion ? Est-ce l’enseignement de Dieu ? Quelle lecture les fanatiques ont-ils de la Loi pour en arriver à ce degré d’intimidation aveugle ?

Oui, quelle honte !

Je n’arrive pas à reconnaître ce judaïsme millénaire qui a façonné notre regard sur « l’autre », notre tolérance et notre libre-arbitre, nul n’est habilité à agresser un enfant qui a eu le tort de ne pas s’enfoncer dans l’extrême et d’essayer de comprendre le monde autour d’elle.

Leur judaïsme n’est pas mon judaïsme. Leur volonté de cibler un enfant sape toute prétention à une rigueur morale.

Naama et sa famille n’ont pas moins le droit à leur interprétation du judaïsme que n’importe qui. Ils n’ont pas moins le droit de vivre leur vie loin de tout harcèlement que n’importe qui. Et ils n’ont pas moins le droit à la protection par la loi que n’importe qui.

Tout à leur honneur, les dirigeants israéliens n’ont pas hésité à prendre la parole pour condamner ces actes méprisables commis par ceux qui croient être la loi et qui peuvent imposer leurs propres règles.

Le président Shimon Peres a déclaré: «La nation entière doit être impliquée à ne pas sacrifier les intérêts de la majorité au seul profit d’une petite minorité »

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a quand à lui précisé: «Dans un pays occidental, dans une démocratie, l’espace public doit être ouvert et sûr pour tous les hommes et les femmes, et il n’y a pas de place pour le harcèlement et la discrimination. » Il a ordonné une répression forte contre les auteurs.

Le Rabbin des forces armées d’Israël, le Brigadier Rafi Peretz, a affirmé de son côté qu’«Il n’y a pas de place à l’interprétation radicale et erronée de la halakha (loi juive), qui sert d’excuse à la discrimination contre les femmes. L’esprit juif, l’héritage de nos ancêtres exige le respect des femmes. »

En même temps, il faut être réaliste ; le problème ne disparaîtra pas du jour au lendemain, même si la loi agit avec force.

La question qui est posée à la société israélienne est plus importante que cet incident terrible. En Israël, une minorité ultra-orthodoxe, parfois jusqu’aux limites de la loi, prétend se réserver des no-religious land. Seule leur « doctrine » sert de repère à ces extrémistes.

Cette minorité se permet d’appeler d’autres Israéliens «nazis». Elle se permet d’attaquer les bases des forces de l’armée israélienne. Elle se permet de prendre des journalistes d’assaut pour les intimider. Elle se permet de cracher sur le clergé chrétien et sur une jeune fille. Elle se permet de faire pression pour essayer d’imposer la séparation des sexes. En d’autres termes, cette minorité se comporte comme si elle détenait la loi.

Comme d’autres extrémistes religieux, ceux-là soutiennent qu’ils disposent d’une ligne directe vers une autorité supérieure et, non moins important, que leur autorité supérieure est en « ligne directe » avec eux.

Depuis trop longtemps, Israël a été indulgent avec ces groupes religieux, en grande partie en raison du système électoral de la proportionnelle.

Aucun parti politique important ne peut se prévaloir d’une majorité absolue en Israël, et le seuil d’entrée à Knesset est si faible qu’il existe constamment des manœuvres politiques afin de gagner le soutien des petits partis, y compris des groupes religieux. Le prix pour ce soutien peut être élevé à la fois en termes de budget et d’indulgence.

Et il est vrai également qu’Israël doit faire face à de profonds défis externes: les aspirations nucléaires de l’Iran, la situation politique inquiétante de son voisin l’Egypte, l’avenir incertain en Syrie, l’arsenal croissant du Hezbollah ou encore l’emprise du Hamas sur Gaza..

Mais rien de tout cela ne devrait nous faire perdre de vue le défi interne posé par un segment de la population qui veut imposer sa volonté à la nation. Prétendre que cela serait un épiphénomène et un événement transitoire n’aidera pas à le faire disparaître.

Jusqu’à il y a peu, Naama était une jeune fille comme les autres, méconnue du grand public, l’enfant d’un pays qui a été largement admiré pour avoir tant donné à ses enfants. Maintenant, malheureusement, elle a été mise sous les feux de la rampe, obligée de grandir trop vite face à la laideur de la haine et de l’intolérance.

La question se posera alors de savoir si cette histoire pourra se révéler comme un tournant dans l’histoire, comme une force qui mobilisera le peuple juif, qui lui permettra de mettre de côté les différences du jour, afin de défendre les valeurs fondamentales de la nation contre la tyrannie d’un petit groupe ?

Quelle que soit ma tristesse pour ce qu’a enduré Naama, il serait plus triste encore, si rien de positif – et durable – pour la société israélienne résultait de cette épreuve.

David Harris, directeur exécutif d’AJC- 30 décembre 2011- Traduit de l’anglais